Reportage

Une sucrerie devenue une exploitation laitière

Le centre pénitentiaire de Ruiselede, dans lequel se trouve une ferme, a une longue histoire. Ce site, qui était à l’origine une sucrerie, est aujourd’hui un lieu de privation de liberté où se trouvent 56 détenus, dont une dizaine travaillent dans l’exploitation agricole.

Le complexe est aujourd’hui divisé en deux parties : un établissement qui accueille des mineurs et le centre pénitentiaire proprement dit pour des condamnés à des peines de 5 à 15 ans. La construction du site remonte aux années 1830 lorsqu’un riche industriel brugeois eut l’idée de construire une sucrerie. La vocation industrielle initiale des bâtiments est encore bien identifiable aujourd’hui. Ce qui est assez surprenant, c’est que cette sucrerie vit le jour dans une région au sol sablonneux peu propice à la culture betteravière, ce que souligne le directeur du centre pénitentiaire, Christian De Vidts : « Toute l’infrastructure était présente pour faire de cette initiative industrielle un succès, si ce n’est la nature inadaptée du sol. »

Ce bâtiment a été construit dans les années qui ont suivi l’indépendance de la Belgique, dans une région où régnait une réelle pauvreté, provoquant un phénomène d’émigration vers les Etats-Unis et le Canada. Christian De Vidts : « A l’époque, beaucoup d’orphelins et de mineurs étaient laissés à eux-mêmes. Ils n’avaient d’autre choix que de mendier ou de voler pour survivre. Pour faire face à cette situation, les autorités décidèrent de reprendre le complexe de Ruiselede pour y a abriter les orphelins et jeunes abandonnés de la région. A une époque, ce site abritait environ 500 mineurs. On les hébergeait, mais on leur donnait aussi une formation professionnelle. »

L’édifice, prévu pour le stockage des matières premières destinées à la sucrerie, allait être transformé en bâtiments agricoles, mais également en ateliers pour permettre aux jeunes de se former au métier de forgeron, cordonnier, tailleur ou tonnelier. Quelqu’un eut même l’idée d’instaurer une formation de matelot. Pour ce faire, on creusa une grande pièce d’eau au milieu des bois dans laquelle on installa un trois-mâts pour les exercices. Cet étang existe toujours et le souvenir du trois-mâts est représenté par une œuvre d’art sur une des berges.  

Vagabonds et collaborateurs

Dans les années 1930, le législateur vota la loi de protection des mineurs, notamment pour éviter que certains mineurs laissés à eux-mêmes ne soient exploités dans des fermes qui leur offrait le gîte et le couvert en échange de leur travail. Par ailleurs, à cette époque, la mécanisation commençait à faire son entrée dans l’agriculture, ce qui réduisait les besoins en main-d’œuvre. Tel était le cas à Ruiselede également où de la place se libérait peu à peu pour d’autres types de population, notamment des vagabonds. Ce n’est qu’après la Deuxième Guerre mondiale que le site allait remplir son rôle actuel de centre pénitentiaire.

Christian De Vidts : « On peut parler d’une prison-ferme ou d’une ferme-prison. Les deux fonctions sont totalement imbriquées. A partir de 1946, le complexe a abrité, outre des personnes sans domicile fixe, des collaborateurs condamnés, donc, pour la plupart, des majeurs. La loi sur le vagabondage fut abrogée il y a une trentaine d’années, ce qui eut pour effet de transformer le centre en prison uniquement. Des mineurs sont encore présents, dans une autre aile, celle de la protection de la jeunesse. » Le type de détenus a évolué au fil du temps. Au cours des premières décennies, il s’agissait principalement de condamnés à de courtes peines, jusqu’à 3 ans. Mais depuis l’entrée en vigueur du ….

… Lire la suite de cette article ? Abonnez-vous dès aujourd’hui au magazine Lait & Elèvage

Texte et photos: Hilde De Wachter

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *